24 octobre 2018 – Flamanville, La Hague, Cherbourg… partout
Ce jour, le prix international Nuclear-Free Future Award (Prix pour un Avenir libéré du nucléaire) sera remis à Paulette et Didier Anger [1] et à quatre autres figures de luttes opiniâtres contre le nucléaire (cf. plus bas), à Salzbourg (Autriche). Tous deux professeurs, nommés dans le Cotentin (en 1970), ils y ont créé le CRILAN [2] et animer plus de quarante années durant les luttes antinucléaires sur la péninsule [3] et bien au-delà, dont le mémorable rassemblement de Cherbourg 2006 (c’est là : ▶) et bien d’autres antérieurement et ultérieurement.
Dernièrement, ils étaient encore du rassemblement Fukuchinon (le 12 avril 2014) que nous avions coorganisé (avec un collectif de groupes qui deviendra SdN Loire & Vienne), très impliqués dans les rassemblement de Flamanville (les 1er et 2 octobre 2016) et de Saint-Lô (le 30 septembre 2017) mais aussi de ceux de Rennes, Laval, Ernée, comme il avaient aussi été présents sur les mobilisations contre les projets d’enfouissement de déchets nucléaires à Izé (en Mayenne, à 12 km de Sillé), à Athis-de-l’Orne, etc [4].
Nous publions ci-dessous la communication qu’il avaient adressée à ceux et celles qui les ont accompagnés dans leurs combats ces quatre décennies et qu’il convient de relayer :
« Bonjour à tous les ami(e)s,
Nous voulons vous en informer : il vient de nous être décernés, à tous les deux, par un jury international de la fondation « The nuclear-Free Future Award », basée à Munich, un prix honorifique dans la catégorie : honorary Lifetime Achievement Awards (https://www.nffa.de). Ce prix nous sera remis le 24 octobre 2018, dans le hall de l’université de Salzbourg, en Autriche, et récompensera quatre autres militants antinucléaires internationaux. La fondation y fêtera également ses vingt ans d’existence.
Notre candidature a été présentée par Linda Gunter et la fondation américaine Beyond Nuclear (www.beyondnuclear.org) que nous remercions.
Nous avons accepté ce prix pour plusieurs raisons :
Nous avons toujours agi pour désenclaver les luttes que nous avons menées ensemble, avec vous, toutes et tous, et pour les faire connaître le plus largement possible. Dans une France complètement engluée dans les certitudes d’un nucléaire étatique, ce contournement de l’information s’est souvent avéré utile.
Nous serons heureux de rencontrer les autres récipiendaires qui mènent ou ont mené des luttes exemplaires : que ce soit Jeffrey Lee, militant australien aborigène dont le clan a lutté contre la volonté d’AREVA d’exploiter l’uranium de ses terres, ou Karipbek Kuyukov, Kazak né sans bras, qui s’est fait le porte-parole à travers le monde, de l’ONU au congrès américain, des effets des essais atomiques de l’Union soviétique au Kazakhstan. Mais aussi plus près de nous, Linda Walker dont l’association au Royaume Uni continue de s’occuper des enfants du Belarus impactés par Tchernobyl et Peter Weish, qui a été longtemps un des responsables du mouvement antinucléaire autrichien.
Nous sommes heureux de figurer à côté d’autres militants français et étrangers, que ce soit notre amie Solange Fernex, Bruno Barillot, Bruno Chareyron, Yves Marignac, ou Almoustapha Alhacen au Niger, qui figurent sur la longue liste des primés pendant ces vingt années d’existence de la fondation. Enfin, et c’est pour nous une évidence, notre action ne peut être dissociée de la vôtre, que ce soit dans le CRILAN et le Collectif antinucléaire Ouest [5], comme dans les diverses coordinations régionales que nous avons su mettre collectivement en place durant toutes ces décennies, où, sur des objectifs communs, nous avons lutté côte à côte, militants individuels comme organisationnels.
L’information utile ne suffit pas, la lutte continue contre le nucléaire civil et militaire, privé ou d’État, ici en Cotentin, dans l’Ouest et partout dans le monde… »
Paulette et Didier
Pour autant, Paulette et Didier ne lâchent pas l’affaire. Leur rage antinucléaire, pondérée mais vissée au cœur, reste intacte. À nous tous de prolonger leur indéfectible engagement pour en finir avec la production nucléaire au plus tôt. Le passif de cette folie incombera malheureusement aux innombrables générations à venir !
Paulette et Didier ont aussi parrainé l’Observatoire du nucléaire. Fin juillet, Stéphane L’Homme leur a consacré un billet que vous pourrez retrouver ici : ▶.
À lire aussi le texte de 2012, toujours d’actualité, de Fabrice Nicolino (de l’appel aux rassemblements les Coquelicots) brossant le portrait de Didier Anger dans le numéro spécial de Charlie Hebdo « L’escroquerie nucléaire » (celui de Paulette serait à venir), c’est là : ▶.
Le Nuclear-Free Future Award (Prix pour un avenir sans nucléaire) a été fondé à la suite de l’Assemblée mondiale sur l’uranium réunie à Salzbourg, en Autriche, en 1992.
Depuis 1998, il est remis chaque année par la fondation allemande Franz Moll pour les générations futures à des personnes ou des organisations ayant œuvré pour un monde sans nucléaire.
[1] Didier Anger a été administrateur du Réseau Sortir du nucléaire entre 2004 et 2009. Il fut un des membres fondateurs des Verts et sera élu au Parlement européen en 1989 (vice-président de la commission Énergie de 1989 à 1991). Il a également été conseiller régional de Basse-Normandie, à partir de mars 1986, pendant deux mandats et demi. Il siège à la CLI, aux Commissions d’information de l’usine de la Hague, de la centrale de Flamanville ou de la DCNS-Cherbourg. Il est également membre du comité de parrainage de l’Observatoire du nucléaire, créé par Stéphane Lhomme (cf. plus haut). Bibliographie : Chronique d’une lutte, chez Simoen, 1978. Silence, on contamine, à compte d’auteur, 1987. Nucléaire, la démocratie bafouée ; La Hague au cœur du débat, Didier Anger, éditions Yves Michel, 450 p., 2002. L’EPR, un désastre en cours, 2016, à compte d’auteur.
[2] Le CRILAN (Comité de réflexion, d’information et de lutte antinucléaire) a été créé en 1975. Son site web est là : ▶. Didier et Paulette en ont été les cofondateurs et ont occupé tour à tour les missions de président et secrétaire avant de passer la main début 2018.
[3] Le Cotentin, ce sont les déchets radioactifs balancés par dessus bord au large, les rejets directs de La Hague dans la mer via un conduit, le centre de stockage de la Manche, les deux réacteurs de la centrale de Flamanville plus leurs rejets atmosphériques permanents autorisés (dont le tritium), le fameux EPR dont il est encore possible d’arrêter la mise en route, La Hague, le plutonium, les piscines, la construction, l’entretien, le démantèlement de sous-marins nucléaires, le va-et-vient incessant des transports nucléaires par route, chemin de fer et mer…
[4] Cherbourg 2006, c’est ici : ▶ ; Rennes, le 17 mars 2007, c’est là : ▶ ; Ernée, le 20 octobre 2007, là : ▶ ; Laval, le 13 septembre 2012, là : ▶ ; Fukuchinon le 12 avril 2014, c’est là : ▶ ; Flamanville, les 1er et 2 octobre 2016, là : ▶ ; Saint-Lô, le 30 septembre 2017, là : ▶ ; comme ils avaient aussi été présents sur les mobilisations contre les projets d’enfouissement de déchets nucléaires à Izé (en Mayenne, à 12 km de Sillé-le-Guillaume, en 2000), à Athis-de-l’Orne.
[5] CAN Ouest (Collectif antinucléaire Ouest) : c’est là : ▶. Ce collectif et d’autres collectifs, groupes, individus… se réuniront prochainement au Mans pour envisager d’autres opérations sur le quart ouest du pays.
Photos : CAN-Ouest. Rémy Sillé (2006, après la manif de Cherbourg). Couverture du numéro spécial de Charlie Hebdo.
Abbdendum De retour en France, Paulette et Didier ont rendu compte de la réception de ce prix, par ce billet :