3 août 2024 : Fête du blé au pain, à Vaas, avec SdN 72


Samedi 3 août 2024 – Au moulin de Rotrou, à Vaas

La vingt-deuxième Fête du blé au pain, à Vaas, est officiellement close ! Si l’endroit a hélas perdu sa généreuse feuillée verte l’an dernier, il n’a rien perdu de son vivifiant lieu de réflexion ! Sortir du Nucléaire 72 y était encore — bien présent cette année. Oui, encore ! Car concernant notre activité antinucléaire, « du pain… sur la planche » nous est encore promis et pour longtemps.

Nucléaire, le retour ?  

Alors que le nucléaire français était assigné à une lente déclinaison avec la fermeture étalée de douze réacteurs, une réduction de la part du nucléaire dans le mix électrique à 50 % et un plafond de production limité à 63,2 GW à l’horizon 2035, ces objectifs (auxquels — à raison — nous ne croyions guère) ont totalement été transmué.

Passées les fermetures des deux réacteurs de Fessenheim, le pragmatisme a vite fait place à une débauche d’irresponsabilité pour le moins anxiogène. De l’atome en-veux-tu-en-voilà : plus vite [1], plus longtemps [2], plus puissant [3], plus nombreux [4], plus militaire [5] est devenu le leitmotiv. Nous n’en sommes pas aux deux cents réacteurs voulus par feu Mesmer (1916-2007), mais tout, et quasi tous (partis [6], élus, politiques, start-ups, société civile) semblent OK pour sa relance ! Le financement de cette incommensurable entreprise reste cependant beaucoup plus opaque !

Vaas communicants

C’est à partir de toutes ces intentions et mesures prises ces dix-huit derniers mois, souvent introduites par les relances de nos interlocutrices et interlocuteurs, que nous avons pu échanger, débattre voire rebondir, mener notre critique de cette vertigineuse relance et proposer d’autres horizons plus vertueux. 

Reste que les projections — plausibles et démontrées — de RTE, de l’Ademe, du CIRED, de NégaWatt pour substituer les énergies renouvelables au nucléaire à l’horizon 2050 (et il est possible de faire mieux avec une vraie volonté politique) ne convainc pas encore les plus rétifs qui, bien souvent d’ailleurs, les ignorent. Moins retors mais très arcboutés sur des données biaisées (« mitage »  des paysages, conflits d’usage, intermittence, métaux et terres rares, démantèlement/recyclage/retour à l’herbe…) certains demeurent néanmoins frileux sur les ENR et fustigent à raison la fuite en avant des usages électriques. Gageons qu’a terme, nous ne pourrons faire l’économie de débats de fond sur nos besoins fondamentaux. D’en définir la nature, les volumes raisonnables eu égard aux ressources disponibles et tout particulièrement ceux — électriques — qui grimpent démesurément (IA/numérique, mobilités électriques, pompes à chaleur). D’ailleurs…

Repenser nos modes de vie

Plus marquée cette année, la partie « université d’été » de la Fête du blé au pain s’interrogeait sur certains aspects et modèles de nos consommations : « OGM cachés » par Christian Vélot, « Nourrir le monde avec l’agroécologie » par l’agronome Marc Dufumier (plus visite à proximité d’une ferme en agriculture biologique) ; « Les plateformes logistiques en Sarthe » par le collectif Stop Amazon 72 distribution ; « L’énergie solaire en vallée du Loir » par l’association Soleil du Loir) ; etc. Pile dans l’actualité, qui, deux jours auparavant, datait le 1er août comme « Le jour du dépassement » pour l’année 2024. Soit un savant exercice prévisionnel du jour ou l’humanité a délà prélevé autant de ressources que la planète ne peut générer en un an, calculé par l’ONG Global Footprint Network. Pas que la faute aux Étasuniens ! Si l’ensemble de l’humanité consommait au même niveau moyen que les Français·es, 1,75 planète Terre serait nécessaire !  Sobriété, équité, partage doivent donc s’inviter dans nos conduites et comportements quotidiens.

En totale résonance avec ce que nous avons encore défendu et défendons depuis toujours sur nos infokiosques à Vaas et ailleurs [7] : sobriété, efficacité, renouvelable. Un triptyque établi par Wolfgang Sachs que nous rappelle la revue Sortir du nucléaire (qu’on recommande à tous, et plus encore son site : https://www.sortirdunucleaire.org/) dans son dernier numéro (n° 102, été 2024). Un concept repris par l’ONG NégaWatt et désormais largement relayé par la mouvance antinucléaire, écologiste, environnementaliste… 

L’ombre de la bombe

Autant que faire se peut nous avons rappelé l’imminente commémoration des explosions atomiques des 6 et 9 août 1945 à Hiroshima et Nagasaki et la mobilisation pour dénoncer leur emploi, hier, évidemment, les menaces répétées aujourd’hui par Poutine, la mobilisation sur cinq jours (du 5 au 9 août 2024) à Tours (à laquelle une poignée de Sarthois·es ont participé) et la nécessité de rejoindre, d’appliquer et de faire vivre le Traité d’interdiction des armes nucléaires (TIAN, entré en vigueur en janvier 2021, adopté en juillet 2017 par 122 pays sur 192 ; au 5 janvier 2024, 93 États l’avaient signé et 70 ratifié) jusqu’au démantèlement total.

20223-2024-2025

Réitérons, ici, notre entière considération à la centaine de bénévoles qui s’active année après année (et souvent, pour un certain nombre, sur d’autres animations proposées au moulin tout au long des saisons) à la faisabilité et la réussite de La Fête du blé au pain.


 Notes

[1] Loi n° 2023-491 du 22 juin 2023 relative à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes.

[2] Alors que le chef de l’Etat (à Belfort le 10 février 2024) et diverses instances s’étaient déjà prononcés pour la prolongation du parc existant (jusqu’au-delà de soixante ans pour les réacteurs nucléaires qui pourraient l’être « sans rien céder sur la sûreté », selon E. Macron ), début juillet 2024, la commission d’enquête du Sénat sur l’électricité recommandait elle aussi la prolongation de la durée de vie des centrales « au-delà de 60 ans » (et la construction de quatorze EPR).

[3] La France est obsédée par la plus haute marche des podiums nucléaires. Depuis la modeste « boule » de Chinon et de Brennilis (75 MWe), la puissance de ses réacteurs n’a cessé de croître : 900, 1200, 1300, 1450 et 1650 ! Un dernier palier de trop, voir un plafond, qui génère d’incommensurables problèmes systémiques nullement anticipés dans le design des six EPR construits et/ou entrepris à ce jour.

[4] Dans le même discours à Belfort (ibid) en faveur de la relance du nucléaire, E. Macron avait annoncé la construction de six EPR de seconde génération, puis la construction de huit EPR2 additionnels. Plus des SMR (petits réacteurs modulaires), dont les designs de deux prototypes américains (NuScale) et français (Nuward) viennent d’être abandonnés.

[5] Alors que le nucléaire a dès son origine d’abord été militaire, le ministère des Armées et EDF ont conjointement annoncé le 18 mars 2024 la réquisition de la centrale nucléaire de Civaux (deux réacteurs sur la Vienne à 176 km du Mans) pour y produire du tritium dès 2025. Un gaz indispensable aux armes de dissuasion (produit à Marcoule jusqu’en 2009) et qui doit être régulièrement renouvelé.

[6] Des participants aux élections, seul·e·s, la France Insoumise, les Écologistes et le NPA s’opposent au nucléaire (libertaires, décroissant·e·s, communalistes… itou). Hélas, suite aux législatives, concernant cette complexe thématique, in fine, le Nouveau Front Populaire a décidé de ne rien décider.               

[7] Nous serons les 28 et 29 sept. au forum « Écologie Sociale & Communalisme » à la ferme du Bas-Palluau, à La Chapelle-Saint-Aubin).


Crédit photo : SdN 72. Visuel : affichette de l’association du Moulin de Robert-Rotrou. Dessins de presse  de Troud (Sarthois) et de Sanaga, publié avec leur aimable autorisation ; pour mieux connaître le travail du premier, c’est là : , du second, c’est là : .