Samedi 9 avril 2016, à partir de 9 h 30 — à Neuville-sur-Sarthe
Du lagon à l’irradiation… Ce samedi 9 avril 2016, L’AVEN (Association des vétérans des essais nucléaires de la Sarthe) tenait son assemblée générale annuelle au restaurant « l’Écrin Doré » à Neuville-sur-Sarthe.
En seconde partie, un documentaire, qui n’avait rien de récréatif !
Parmi les revendications de l’AVEN, la reconnaissance par l’Etat français des préjudices sanitaires et l’indemnisation compensatrice des victimes civiles et militaires des essais nucléaires, plus le droit à pension pour ces personnes et leurs ayants droit, sont les plus connues du public. Mais elle fournit aussi une aide juridique aux victimes pour la reconnaissance de leurs requêtes, dans le cadre de la loi Morin de 2010, et mène des actions plus sourdes qui vont du recensement des personnels des ex-centres d’essais nucléaires [1] ou gravitant autour à l’accès des victimes à leur dossiers médicaux militaires. Elle veille également sur les présomptions d’origine des maladies radio-induites par les essais nucléaires menés par notre pays, qu’ils l’aient été en atmosphère ou sous terre.
Et l’affaire n’est pas mince ! Les personnels civils et militaires ayant travaillé sur ces Centres d’Expérimentations seraient plus de 150 000, dont plus d’un tiers de l’ouest. Citant une étude britannique, Bruno Barrillot (co-fondateur de l’AVEN, de l’Observatoire des armements et de Moruroa E Tatou en Polynésie, intra) rappelle souvent que : « Un vétéran sur trois est décédé avant l’âge de soixante ans ; un sur sept n’a pas pu avoir d’enfant ; les enfants et petits-enfants des vétérans ont des conséquences pathologique semblables à celles des vétérans eux-mêmes. »
Outre l’obligation statutaire annuelle faite aux associations, il y avait bien lieu de faire le point, l’actualité ayant bruité sur ce sujet peu de temps auparavant, lors du voyage en Polynésie de F. Hollande. C’est la loi n° 2010-2, dite Morin (du nom du ministre de la défense de l’époque), relative à la reconnaissance et à l’indemnisation des victimes des essais nucléaires français, qui régit leur statut depuis le 5 janvier 2010. A minima, elle est censée les accompagner dans le calvaire qui les touche dans leur chair. Les personnels civils et militaires ayant travaillé sur ces centres d’expérimentations seraient plus de 150 000, dont plus d’un tiers de l’Ouest. Hors, leurs dossiers n’avancent guère plus vite qu’une tortue à jambe de bois, en dépit des avis scientifiques corrélant leurs maladies avec la proximité des explosions. Florence Bourel (qu’on voit dans le film Bons baisers de Mururoa) fera un point juridique sur ces dossiers.
Quoi d’étonnant ? La loi idoine avait l’essence démagogique classique : concéder un texte dont les conséquences coûtent le moins possible à l’Etat ! Implicitement balisée pour bénéficier au moindre nombre (estimée à une centaine selon le susdit ministre), peu en jouissent cinq ans après. Seulement « une vingtaine » sur plus d’un millier, a reconnu le chef de l’Etat, le 22 février 2016, lors de sa visite à Papeete ! Et d’annoncer — généreusement — la révision du traitement des demandes d’indemnisation et la modification partielle du décret d’application pour en « préciser la notion de risque négligeable », mais seulement « pour certaines catégories de victimes lorsqu’il est démontré que des mesures de surveillance indispensables n’avaient pas été mises en place ». Une justification assurément difficile à établir qui sent encore bon le long parcours du combattant. La course d’obstacles devrait donc continuer… Le temps, c’est de l’argent !
Michel Verger, du CIVEN (Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaires français), répondra aussi aux interrogations. Depuis le 18/12/2013, l’article 53 de la loi n° 2013-1168 a changé le statut juridique du dit CIVEN. Auparavant consultatif, il est désormais indépendant et a compétence pour décider d’attribuer, ou pas, des indemnisations au titre de la loi Morin.
En tragique miroir de leur funeste parcours, le film Bons baisers de Mururoa, de Larbi Benchiha [2], était au programme. C’est un excellent documentaire qu’on ne saurait trop vous recommander, à diffuser sans modération. Nous vous en avions parlé ici : . Vous pouvez le voir dans son intégralité là, avec cette réserve d’usage [3].
[1] CSEM, Centre Saharien d’expérimentations militaires (4 esssais atmosphériques) , CEMO, Centre d’expérimentation militaires des oasis, dans le Hoggar (13 essais souterrains), et CEP, Centres d’expérimentation du Pacifique (41 essais aériens, 137 souterrains et 15 expériences de sécurité).
[2] Bons baisers de Mururoa (durée : 53 mn) est produit par Aligal production et France Télévisions. Il semble, pour l’instant, qu’il n’ait été diffusé que sur la chaîne régionale France 3 Région Ouest où Larbi Benchiha travaille comme journaliste (à Rennes), le lundi 15 février 2016, à 23 h 45 (spécial confidentiel donc) et rediffusé le jeudi 10 mars 2016, à 8 h 45 (là aussi à une heure de grande affluence !) Bien d’autres documentaires sont disponibles sur le sujet, celui-ci.
[3] Il y a toujours une indécence à offrir l’accès gratuit d’un travail déjà peu diffusé et pas forcément bien rétribué. Pour l’heure, il ne semble pas disponible en streaming, mais il l’est en DVD au moins ici. A défaut, faites-en une large promotion autour de vous.
Larbi Benchiha est un récidiviste. Á sa décharge, il est d’origine algérienne. Il a déjà produit plusieurs films sur le sujet : Vent de sable, tourné en 2008 ; le Sahara des essais nucléaires ; Mémoire de sable ; L’Algérie, de Gaulle et la bombe et bien d’autres sur l’exclusion sociale, la culture hip hop, le mouvement punk ou le conflit israélo-palestinien. Alors, faites-en la promo à chaque occasion. Allez voir et proposez ses films sur vos périmètres d’intervention.
Nous avions déjà évoqué l’AVEN Sarthe ici et le livre Boulanger de l’extrême, d’un voisin de Durtal, Alain Juigné (originaire de Saint-Pierre-du-Lorouër), publié aux éditions Persée et président de l’AVEN Maine-et-Loire, c’est là. Pour un historique sur les essais nucléaires français en Algérie, c’est là .
Une autre association : Mururoa E Tatou (Mururoa et nous) milite pour la défense des victimes des essais nucléaires. Son action semble plus centrée sur la Polynésie (sic). Le site internet de l’Association des anciens travailleurs et victimes de Mururoa et Fangataufa est là.
Et pour terminer, l’Association 193 (que nous ne connaissons pas), de confession chrétienne, qui s’est aussi manifestée lors de la visite de F. Hollande en février. Son site est ici.
Photos : copies d’écran.