Une journée contre la poubelle nucléaire à Bar-le-Duc, samedi 16 juin 2018


Samedi 16 juin 2018, de 10 heures à 20 heures – Bar-le-Duc (Meuse)

« Plus penser que dire » est la devise de la ville de Bar-le-Duc ! Samedi 16 juin (à l’avant-veille du bac de philo), l’hétérogène mouvance opposée à l’industrie nucléaire, à la perpétuation de ses scories et de leurs mé-gestion façon CIGéo, y était elle aussi invitée à « réfléchir » le matin, mais aussi à dire et « agir » l’après-midi.

Cette journée contre la poubelle nucléaire était conjointement organisée par les Élu·e·s opposé·e·s à l’enfouissement des déchets radioactifs (Éodra), le Collectif contre l’enfouissement des déchets radioactifs (CEDRA), plus les Chouettes et Hiboux de Bure.

Remue-méninges

Ce samedi, la « Belle Endormie » [1] a pour le moins été bousculée dans sa prétendue torpeur. L’après-midi surtout, puisque la fin de matinée (de 10 heures à 13 heures) consacrait pas moins de trois heures à quatre tables rondes d’une heure et demie chacune (sous le chapiteau et dans le hall des Brasseries), à divers débats dont vous retrouverez les items en note [2].

Simultanément, les kiosques infos, ateliers masques, chorales… s’activaient chacun dans leur registre. Itou à l’accueil des bus, aux stands de restauration et sur les diverses animations, avant que le grand départ du houppier ambulant de la « forêt » humaine et de ses zosieaux ne s’ébranlent vers le centre ville.

Déambulation : le bois Lejuc s’invite en ville

Précédé du tracteur de J.-M. Simonet (saisi par la gendarmerie lors d’une précédente manifestation) et sa bétaillère transportant un poirier mort symbolisant un possible destin du territoire, lentement, le cortège de basses tiges s’est ébranlé du hall des Brasseries (av. du 94e-Régiment-d’Infanterie) à la préfecture (pl. Reggio) via les quais de l’Ornain (Sadi-Carnot rive droite et Victor-Hugo, rive gauche), le bd de La Rochelle et la rue Jean-Jacques-Rousseau, délocalisant ponctuellement le « bois Lejuc » à « Bar-le-Juc » [3].

Plutôt nocturne d’habitude, l’un des deux strigidés géants — un hibou (duc ?) et une chouette — ouvrait aussi la marche aux 2 000 (chiffre de l’Est Républicain) à 2 500 manifestants (1 000 pour les autorités), la plupart porteurs de rameaux chlorophyllés (cf. photos ci-contre), venus à Bar-le-Duc pour se rencontrer, échanger et exprimer leur rejet du projet d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure (Meuse). Nature du peuplement : des autochtones, des nouveaux « établis », des éloignés freelance ou déversés d’une dizaine de bus [4], des Belges, des Allemands, des Suisses… et juste un peu moins d’une dizaine de Sarthois·es (cf. photo de quelques-un·e·s). Défilé bigarré, regards  et chevelure de « loups » emplumés (demi-masques figurant nos susdits oiseaux), cortège festif et gentiment tonitruant avec ses deux géants, fanfare, batucada, chorale [5], chorégraphies et même son bar ambulant pour étancher la soif des instrumentistes, choristes, slogmeurs, marcheurs… Sage anticipation, la préfecture ayant ordonné la fermeture des magasins !

Chemin faisant, quelques devantures ciblées, de prestataires ou d’entreprises supposées contractuellement liées à l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA) et ses chantiers, ou à des pairs nucléocrates, ont quand même essuyé quelques dégradations (tags et/ou bris de vitrines). Aussi, de-ci de-là — hélas ! — quelques « dégâts collatéraux », sans aucun lien de cause à effet probant ni avéré.

Place Reggio, chacun a pu faire ses emplettes au marché paysan et se restaurer auprès des cantines, buvettes et/ou écouter les prises de paroles, militantes ou pas, et celles des organisateurs qui ont d’ores et déjà pris leurs distances avec le très officiel et très pipé débat public prévu à l’automne par le ministre de la transition écologique et solidaire [6] qu’ils appellent à boycotter et à lui préférer des débats autogérés. Une semaine d’action est aussi prévue du 3 au 10 septembre, sur tout le territoire.

C’est à la très déjantée compagnie théâtrale militante Jolie Môme (cf. vidéo plus bas) qu’est revenue la difficile tâche — transformée — de boucler festivement cette énième étape d’un combat sûrement encore long et âpre, mais déterminé.

Lendemains répressifs

Autour du mercredi 20 juin, une nouvelle vague d’arrestations et de perquisitions a visé la mouvance anti-CIGéo (quatorze perquisitions, neuf personnes placées en garde à vue et de nombreuses convocations pour audition) impliquant même — chose plus rare — l’avocat de certains d’entre-eux, Maître É. Ambroselli, ce qui a fait se dresser une déferlante de soutiens de la profession, d’intellectuels, artistes, etc. (leur tribune est au moins là : ). Une opération d’intimidation soit-disant engagée dans le cadre d’actions menées à l’été 2017 (à l’écothèque et dans l’hôtel-restaurant du laboratoire de l’ANDRA, et lors de la manifestation du 15 août 2017) mais qui survient fort curieusement aux lendemains de cette manifestation à Bar-le-Duc et s’additionne à l’expulsion du bois Lejuc, le 22 février 2018 (c’est là : ).


Comme d’hab’, François Nicolas (captation et montage), de SdN Pays Nantais, nous a livrés une vidéo exhaustive, titrée « Les hiboux à Bar-le-Duc » ici : . Celle de Reporterre (plus axée sur les débats) est là : .


[1] Surnom également donné à plusieurs autres villes de France comme Arras, Bordeaux ou Reims.

[2] Quatre items étaient au programme. 1/ La construction anti-démocratique de CIGéo depuis vingt ans. 2/ La mise en œuvre de stratégies vicieuses par les institutions pour le faire passer. 3/ La colonisation du territoire à travers l’exemple de la nucléarisation autour de CIGéo et des GPII. 4/ Réflexions sur les manières de lutter.

[3] Le bois Lejuc avait à nouveau été vidé manu-militari de ses occupant·e·s le 22 février 2018.

[4] Bus arrêtés et certains contrôlés techniquement aux abords de Bar-le-Duc… Contrôles d’identité aléatoires dans certains autocars, voire l’intégralité des passager·e·s comme par exemple celui de Nantes, Angers, Le Mans..

[5] La chorale Les sans nom, communarde, révolutionnaire, prolétarienne… exhume et redonne une identité à des textes oubliés.

[6] Nicolas Hulot, qui s’était autrefois affiché affublé d’un écriteau affirmant : CIGéo Bure : Je dis non ! Photo ci-contre.


Affiches : du CEDRA, de l’Eodra et des Chouettes-Hiboux de Bure. Crédit photos : SdN 72 et les deux avant dernières de SdN 41.  Photo de N. Hulot : Bernard Nicolle. Photos ci-dessous SdN 72.