Troisième « Marche pour le climat » du 8 décembre


Samedi 8 décembre 2018 – Au Mans, de la gare nord au tunnel, via la préfecture

Les schémas élaborés en amont de cette troisième Marche pour le climat ont quelque peu été bousculés par les tumultes de l’actualité sociale. La thématique retenue sur les transports s’est muée en un assemblage pressenti comme improbable avec le mouvement des Gilets jaunes dont c’était le quatrième week-end. Un rapprochement singulier qui s’est résumé dans l’expression : « Fin du monde et fin du mois, c’est la même urgence ». La sortie du nucléaire s’inscrit aussi dans ces urgences.

Convergence des luttes ?

Cette troisième Marche pour le climat devait avoir comme thématique les transports, qui pèsent — excusez du peu — pour 29 % des émissions de CO². Deux cortèges alternatifs à mobilité douce et aux parcours différenciés étaient prévus, l’un piéton, l’autre roulant (vélos et déclinaisons, autres modes de déplacements non thermiques, etc), avec la gare nord comme point de départ symbolisant les transports collectifs à privilégier et promouvoir. Les deux mobilisations (Marche pour le climat et Gilets jaunes) ayant choisi de manière fortuite le même lieu de départ (à une demi-heure d’intervalle) et une progression vers la préfecture, les militant·e·s des deux bords ont finalement délibéré pour un seul et même défilé. Si « Les hommes construisent trop de murs et pas assez de ponts », ici, un pont (non thermique) a assurément été créé, qui n’a sans doute pas fait l’unanimité mais qui a suscité de la réflexion et revisité quelques a-priori ! Confère aussi le slogan contenu dans notre chapô.

Le 8 décembre

Cette date du 8 décembre avait évidemment été retenue pour tomber au beau milieu de la COP 24 [1] à Katowice en Pologne, où la France ambitionne encore et toujours de se propulser à l’international comme une championne du climat alors que ses propres émissions de gaz à effet de serre — loin de décliner — ont augmenté de 3,2 % (contre 1,8 % pour l’Europe) depuis le très surfait Accord de Paris de 2015 devant prétendument contenir le réchauffement entre 1,5 et 2 degrés supplémentaires [2]. Elle intervenait aussi aux lendemains de l’alarmante publication du nouveau rapport du GIEC, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le 8 octobre, pour qui tout se joue dans les deux ans, et de la toute récente présentation de la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) par le président Macron à Montreuil (le 27 novembre) qui a surtout préféré procrastiner : fermeture de Fessenheim avant la fin du quinquennat (remake de Hollande), fermeture de quatre à six autres réacteurs d’ici 2030 (ce qui ne l’oblige en rien, même en cas de reconduction de mandat présidentiel), décision de construire jusqu’à six nouveaux EPR low cost… reportée à 2021 et tergiverser sur les objectifs de réduction de la consommation énergétique en matière de logement, de transport, d’agriculture, etc., pour finalement accoucher d’un Haut conseil pour le climat [3], une énième instance de pseudo-concertation, à défaut de prendre les options politiques déterminantes que l’urgence climatique impose. Nous avions anticipé ces atermoiements dans notre tract distribué lors de la seconde Marche, c’est là : .

Alarme climatique et sociale

Passé un pied-de-grue prolongé sur le parvis de la gare, le cortège a lentement et sereinement progressé vers sa première halte, devant la préfecture, puis sous le tunnel Wilbur-Wright, son but final. Une destination choisie pour son atmosphère particulièrement polluée par les gaz d’échappement, sans passer ni par l’hypercentre ni par l’hôtel de ville [4] aux accès entravés et solidement défendu par la soldatesque [5] bardée de la mitraille produite en Sarthe (chez Alsetex à Précigné) et à Pont-de-Buis (chez Nobel Sport), dans le Finistère [6]

Voulue paisible, la manifestation le restera de son début à sa fin. Tonnante, festive… elle le sera aussi ! Notamment grâce à la tonitruante batucada (réunion de cinq bands) rythmant l’allure et les postures, en passant par l’alarme climatique (Climate alarm) bruyamment sonnée à la préfecture (et internationalement), aux chants et slogans entonnés et déclamés çà et là, et spécialement devant l’office du tourisme puis de la cité judiciaire et finalement sous les arcades du tunnel, momentanément rendu au piétons.

Donner de la voix, c’est aussi développer, argumenter et donner du sens. Quelques orateurs, militants et activistes moins aguerris s’y sont collés, place Aristide-Briand (préfecture) et sous le tunnel. La plupart rapprocheront les revendications sociales et environnementales et vice versa. Du militant d’Attac repensant la fiscalité aux doléances des Gilets jaunes en passant par la nature, l’activité et l’actualité des groupes Amis de la Terre, ANV-COP 21, Greenpeace. Aussi Alternatiba ! J’en oublie ?

De la violence compréhensive au happening interpellateur, quel est le plus « productif » ? Chacun y répondra selon ses convictions. À deux reprises (à la préfecture et devant les gardes mobiles, rue Couthardy) des manifestants se sont spontanément agenouillés mains derrière la tête en référence aux étudiants humiliés de la sorte deux jours auparavant à Mantes-la-Jolie par les forces de l’ordre. Au bout du bout, la manifestation s’est aussi conclue en arborant symboliquement, divers masques antipollution en dénonciation du cocktail de gaz viciés, GES et particules fines massivement concentrés sous cette entrée de ville, mais aussi en ville, sur l’agglomération et insidieusement plus ou moins partout sur la planète.

Cette surprenante manifestation bicéphale s’est clôturée sur un appel à rejoindre et soutenir l’occupation du dépôt pétrolier, rue de la Foucaudière assiégé depuis plusieurs jours par les Gilets jaunes pour y dénoncer « la société tout-pétrole » et un second appel à former « une assemblée citoyenne pour la justice climatique et sociale » qui pèsera sur les politiques locales. Si vous êtes intéressé par cette dernière proposition, c’est là : .

Le nucléaire ne sauvera pas le climat

SdN 72 était bien partie prenante de cet événement. Avec sa spécificité. Visible, sans plus d’ostentation qu’une large banderole affirmant : « Le nucléaire ne sauvera pas le climat » et notre proposition de tract reproduit en bas de page. À 180° des propos opportunistes de l’industrie nucléaire qui s’offre paradoxalement aujourd’hui en alternative aux énergies fossiles pour juguler le réchauffement climatique.

Tout au long de son histoire, cette filière n’a jamais manqué une occasion de ripoliner de vert sa désastreuse course dans le mur. Fort heureusement, la sobriété, l’efficacité énergétique complémentées des énergies renouvelables permettent aujourd’hui de nous exonérer des ressources fossiles et fissiles. Au risque d’être trop long, nous vous conseillons d’approfondir cette affirmation «Le nucléaire ne sauvera pas le climat » sur trois sites qui le feront mieux que nous pourrions le faire en raccourci ici. Sur notre site national Sortir du nucléaire : , à découvrir aussi sous forme d’infographie, là :  ; sur le site des Amis de la Terre :  et enfin celui de Global chance : . Dans le désordre, ça marche aussi.

Le nucléaire ne peut être une planche de salut pour le climat. Au contraire ! Le moindre denier dépensé pour sa pérennisation est contre-productif pour une transition énergétique rapide et décisive.


La vidéo de Luce pour Alternatiba est ici : , celle du journal Le Maine libre, est là : .


Pour connaître la date du prochain R-V de la Marche pour le climat, consulter notre site, bien sûr (sdn72.org dans événement), celui d’Alternatiba, c’est là : , ou encore sur Démosphère, c’est encore là : .


[1] 24e Conférence annuelle des parties du protocole de Kyoto de l’ONU sur les changements climatiques du 3 au 14 décembre.

[2] Même s’ils étaient respectés à la lettre, l’Accord de Paris 2015 mènerait toujours le réchauffement vers une trajectoire de + 3° C !

[3] Comme disait de Gaulle : « Quand on veut enterrer un problème, on créé une commission ».

[4] Le maire, S. Le Foll, souhaitait voir le collectif citoyen organisateur renoncer à cette manifestation. C’est aussi la préfecture qui imposera d’emprunter la voie libre du tramway sur une partie du parcours quand l’objectif était de conforter ce type de transport et même sa gratuité.

[5] Les effectifs locaux de la police nationale avaient été renforcés par un escadron de gendarmes mobiles basé à Mâcon (Saône-et-Loire) suite au « dérapage »  d’éléments extérieurs à la manifestation lycéenne du jeudi précédent.

[6] Un jeune Manceau manifestant à Paris percuté par une grenade de type GLI-F4 en a perdu une main. Idem pour un relanceur à Bordeaux.


Illustration : logo Climate alarm. Photos : Rémy Le Guillerm (Colère jaune, planète bleue… et Nucléaire/Déclaration universelle des droits de l’Homme). Autres : SdN 72. Flyer : Réseau Sortir du Nucléaire.

Addendum (du 23/12/2018) La prochaine Marche pour le climat (la quatrième) aura lieu le 27 janvier 2019.